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Moulins-lès-Metz
par Gabriel Poiré
Ce matin, sur Facebook,
je découvre une photographie de Gabriel Poiré
sur laquelle il m'a identifiée.
Sourires sourires...
Gabriel Poiré habite en Argentine,
nous ne nous sommes jamais rencontrés, en chair et en os.
Il porte le même nom que moi,
mais n'appartient pas à ma famille.
Allez, je vous raconte...
On ne devient peut-être pas écrivain par hasard.
Mon papa rédigeait des poèmes d'amour, prenait des notes de ses lectures, entretenait une correspondance assidue, en tous les cas avec ma mère, laquelle écrit, aussi, régulièrement...
Mon grand-père paternel, de son côté, était un érudit local, directeur d'école passionné par Moulins-lès-Metz.
Il a travaillé une bonne partie de sa vie à la rédaction d'un opuscule, important, sur cette commune, dans laquelle il exerçait et vivait.
L'ouvrage ne devait paraître qu'en 1957.
Mon grand-père s'est éteint le 8 mars 1956...
J'ai découvert ce petit livre - qui est tout de même désormais au répertoire de l'Inventaire Général du Patrimoine Culturel de la région lorraine - au moment de la mort de ma grand-mère : nous héritions d'une incroyable bibliothèque d'histoire locale, personnelle, aux pages jaunies, souvent ouvertes au coupe-papier.
Quelle émotion !
Mais je n'ai jamais été passionnée par l'histoire locale, je ne me suis pas penchée tout de suite sur ce livre, pourtant signé du nom de mon ancêtre.
Il a fallu une réédition, en 2002, pour que je lise avec attention cet ouvrage. À la demande de l'éditeur, je l'ai préfacé, le cœur battant, convaincue que s'écrivait ainsi une page de notre histoire familiale, comme une continuité, dans la différence, entre le père de mon père, et la descendante que je suis.
Un fil ténu. Un pari tenu.
Je venais d'expédier le texte demandé
aux éditions Le livre d'histoire
lorsqu'un matin, en allumant mon ordinateur,
je découvre avec stupéfaction que j'ai reçu un mail d'un certain...
Gabriel Poiré.
Stupéfaction.
Vous ne pouvez le deviner : les descendants de mon grand-père sont très nombreux... par familles entières de six ou sept enfants, petits-enfants... J'ai des cousins, des cousines, des petits-cousins, des petites-cousines à profusion.
Mais pas un seul Gabriel parmi ces hordes de petits.
Gabriel Poiré m'écrivait donc !
En espagnol, qui plus est.
Ou plus exactement en argentin.
Eh bien oui, Gabriel Poiré, celui dont je vous parle, là,
habite l'Amérique latine.
Son premier message disait,en gros,
qu'il s'était amusé à taper son nom sur Internet,
qu'il avait découvert mon existence d'écrivain, peintre et sculpteur,
et qu'il trouvait amusant de me passer ainsi le bonjour.
Gabriel !
La coïncidence, juste au moment où je me préoccupais de mon grand-père, avec la réédition de son livre, était trop amusante.
Nous avons correspondu, je lui ai envoyé un petit cadeau :
ce livre, à son nom...
Cet Argentin a des ancêtres très lointains originaires d'Europe, mais d'Italie, plutôt...
De Genova, de Gênes...
Et là j'ai souri, encore. La vie vous fait de ces farces, parfois.
Non ! Pas d'ancêtres connu chez les Poiré du côté de la botte méditerranéenne... Non ! Ce serait trop simple.
Mais ma grand-mère, la femme de Gabriel, ma grand-mère s'appelait Marguerite.
Marguerite portait ce doux nom de jeune fille de... Génois.Ben oui !
De Gênes ?
Pures coïncidences, je le sais bien...
En attendant, ce Gabriel du bout du monde continue à communiquer avec Patrick et moi assez régulièrement. Il a traduit pour nous, avec sa compagne Marina
"Tous les chats" (1e et 2e édition)
et
"Quand le Père Noël était petit".
Ce matin, Gabriel s'est amusé à se prendre en photo avec le livre qui porte son nom...
Sourires sourires !
Ci-dessous, retrouvez la photographie
de la couverture de la première édition
du livre - posthume - de mon grand-père...
Cette monographie d'histoire locale, publiée initialement en 1957 par Marius Mutelet, éditeur, a été rééditée en 2002 par les éditions Le Livre d'histoire-Lorisse.
Ma préface, jointe à ce fac-similé de l'édition originale, constitue comme une lettre adressée dans le temps à mes grands-parents depuis si longtemps disparus...
Un dialogue, un lien malgré la mort.
Ci-dessous, vous trouverez la photographie des deux éditions
Voici le début du texte que j'ai écrit au moment de la réédition...
L'édition originale de Moulins-lès-Metz, par Gabriel Poiré, a été achevée d'imprimer le quinze avril 1957 : simple hasard, il s'agit du jour anniversaire de Robert, son fils, mon père, et de Martin Poiré-Parnin, mon neveu... comme s'il y avait un lien, dans les dates, entre ces trois générations d'une même famille.
Je n'ai pas connu ce grand-père au livre dont nous étions fiers, décédé depuis longtemps lorsque je suis née... mais je peux dire que je l'ai rencontré, indirectement, en 1974. À la mort de son épouse, ma grand-mère, Marguerite Poiré, l'héritage fut tiré au sort parmi les six enfants. Maman se trouva soudain propriétaire d'une bibliothèque prodigieuse, celle du Papi, l'érudit d'histoire locale. J'ai en mémoire l'arrivée à la maison de ces cartons de brochages précieux, reliures remarquables, déballage magique de trésors de mille et une nuits, ces plaquettes rares, ces feuillets jaunissants, déjà, coupés amoureusement par un spécialiste, fin lettré qui avait su rassembler des ouvrages exceptionnels. De ce premier choc avec ces merveilles livresques, - quelques-uns rédigés en lorrain -, mon goût, certainement, pour les mots... Je lui dois énormément : cette réédition constitue un hommage qui me bouleverse.(...)
Anne Poiré
24.2.02
L'éditeur de 2002 écrit de son côté,
pour présenter l'ouvrage :
La lecture du premier livre consacré à l'histoire d'une localité est toujours émouvante : on y sent la fraîcheur du pionnier, l'appétit de savoir et la volonté de communiquer que l'on ne trouve guère dans les productions postérieures. Ainsi en est-il de la monographie de Gabriel Poiré, qui a été directeur d'école pendant 20 ans à Moulins-Alger, secrétaire de mairie, organiste et éducateur sportif et dont l'attachement pour la ville se lit entre les lignes. Entre le village des origines (premières mentions écrites de son nom en 936 et 943) et celui au sein duquel vivent les Moulinois du milieu du XXe siècle, que d'événements et de péripéties !
Pourquoi « notre vieux pont » enjambe-t-il une prairie ? Pourquoi les bans qui formèrent le village de Moulins (ban l'évêque, ban Saint-Martin, ban Saint-Paul, ban Noiron et ban de Marly) formaient-ils des réalités aussi disparates ? Qui était Arnould de Cervole, surnommé l'Archiprêtre, étrange capitaine de brigands ? Est-il vrai que les clefs de la ville de Metz furent remises au connétable de Montmorency « à Fristot, proche Mollin » ? Qu'Ambroise Paré soigna aussi bien les ennemis blessés, soldats de Charles Quint (1553) que les Français, après un engagement sévère au sortir du village ? Qu'Henri IV fut obligé de se déplacer à Metz (passage à Moulins en 1603) pour y ramener la paix intérieure ? Gabriel Poiré répond à toutes ces questions, et à de nombreuses autres, dans son ouvrage, sans oublier pour autant la vie festive (fête brillante donnée en l'honneur du duc Antoine de Lorraine, en 1475, visite de l'empereur Maximilien et de ses plus hauts dignitaires, en 1498, passage de Guillaume II en personne, le 11 mai 1914...), la vie religieuse (procession des Rogations) et les dévastations guerrières qui marquèrent l'histoire de toute la région, en particulier la guerre de Trente Ans qui vit défiler dans le val de Metz, à Moulins, Scy, Chazelles et Rozérieulles, les soldats en campagne, qui se ravitaillaient sur place et devenaient parfois des déserteurs, des pillards, des bandits redoutables.
La réalité anecdotique n'est pas oubliée : la relation de la guerre du tabac, qui eut lieu en 1628, est à la fois pleine d'enseignement et rocambolesque, l'histoire du château de Frescaty, édifié à partir de 1711, contient bien des éléments dramatiques (démolition de la chapelle et de l'orangerie, par le chevalier de Ramsault au moment de la Révolution, puis destruction de l'édifice par un incendie en 1793, construction d'un nouveau château qui disparaîtra sous les bombardements en 1944) ; et la situation stratégique de Moulins-lès-Metz ne se démentira pas au fil du temps, pendant la Révolution et l'Empire, au moment de l'invasion de 1814, lors du blocus de 1815, en 1870, quand Bazaine se réfugia à Moulins (au château Grignan), en 1918, quand les Français reprirent Metz, en 1940 et 1944, des désastres à la Libération. Impossible pour les Moulinois d'aujourd'hui, qui habitent une cité agrandie et rénovée, de négliger ce turbulent passé.Pour retrouver cet ouvrage sur le site de l'éditeur, cliquez ici.
Il s'agit d'un lien affectif,
vous vous en doutez.
Cette photographie reçue aujourd'hui depuis La Plata, Argentina m'a donné envie de vous raconter cette histoire... cette rencontre, à travers le temps, l'espace, ce rapport, entre les êtres, que l'on soit ou non d'une même famille.
Et puis l'écriture est là, toujours elle...
Merci Gabriel !
Tags : Poiré, Guallino, Moulins-les-Metz, monographie, préface, grand-père, livre, éditions, réédition, Argentine, hasard, rencontre, histoire locale
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Commentaires
5KamLundi 14 Décembre 2015 à 09:35L'histoire familiale, quelle histoire !!! Merci de nous la faire partager
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Lundi 14 Décembre 2015 à 09:43
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Merci Mdo, j'ai été très touchée de recevoir cette photographie depuis l'autre bout du monde. Les coïncidences sont toujours amusantes, et ce Gabriel qui n'est pas de ma famille compte tout de même de plus en plus... Sourires sourires !
3MdoLundi 14 Décembre 2015 à 09:22Super cette info sur le blog...
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Je possède une photo prise à la fin de la guerre à Carcassonne et où se trouve au premier plan Gabriel Poiré .. je peux vous l'envoyer si vous voulez ( c'est , à mon avis un document historique que je pense transmettre également à la mairie de Moulins ) monsieur Poiré , passionné d'histoire aurait certainement été interressé par ce que je suis en train de faire " faire raconter à ma mère leur expulsion dans l'Aude de 1940 à 1945 et leur retour en Lorraine .
cordialement
Bernadette
Merci pour ce message et les photos, bien reçues, que je vais transmettre à ma famille ! Merci !!!!!!