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Cérès Franco
Un hommage digne de ce nom
lui a été rendu à Montolieu-Village-du-Livre, dans l'Aude
ce samedi 22 octobre 2022,
avant la fermeture temporaire de ce lieu majeur,
pour travaux, avant restructuration...
Nous avons dansé, en pensant à Cérès,
à Dominique, et même à ma Maman...
Cérès aurait apprécié que l'on festoie, ainsi, sur des airs latinos,
en pensant à elle.
Philippe, son gendre,
ses petites-filles, Camilla, Clémence et Lucie,
mais aussi ses arrière-petits-enfants étaient présents,
émouvants.
Cecilia Matteucci a su rappeler l'essentiel.
De gauche à droite, Philippe Hardouin - Cecilia Matteucci - Camilla Rommelaere - Clémence Hardouin - Jean-Hubert Martin
J'avais prévu
de lire le texte suivant...
Finalement, j'ai improvisé, brodé, transformé.
Tant pis pour vous,
si vous n'avez pu faire le déplacement !
Cérès, nous l’avons rencontrée dans les années 80. Patrick est monté à Paris déterminé à trouver une galerie d’art qui veuille bien montrer son travail, et il est revenu dans l’Aveyron, où nous vivions alors, très ému. Cérès Franco venait d’entrer dans notre vie.
Nous ne pouvons dissocier la galerie de la rue Quincampoix, L’Oeil de Bœuf, de rencontres irremplaçables avec des poètes comme André Laude ou des artistes comme Stani Nitkowski, Stani, que nous avons découvert, là, pour la première fois, sans oublier Chaïbia, Joanna Flatau, ou encore des critiques majeurs comme Laurent Danchin, et combien de collectionneurs passionnés : c’était un lieu de culture, majuscule, un îlot de force et d’intensité, d’effervescence, à deux pas du centre Beaubourg.
Nous ne pouvons dissocier la galerie de son appartement - plus que celui de la place des fêtes, celui de la rue Quincampoix : juste au-dessus de L’Oeil de Bœuf, aux portes peintes par Chaïbia, dont chaque millimètre carré ruisselait de couleurs vives, chaleureuses. Chez elle les livres eux-mêmes étaient enchâssés dans des œuvres, partout : les plus beaux Corneille, c’est chez Cérès que nous les avons admirés. Et sans elle, jamais nous n’aurions découvert bien des grands artistes.
Nous avons une pensée particulière – émue - aujourd’hui pour Dominique Polad-Hardouin, sa fille, Dominique, qui nous a raconté, à Lagrasse, à Patrick et moi, comment elle a appris à aimer et admirer sa mère, à comprendre la force de l’art, à Ibiza, un jour de sa jeunesse – dans les années 60 - où elle a vu Cérès organiser courageusement une grande vente aux enchères sur la plage pour soutenir « son artiste », alors totalement inconnu, Michel Macréau. Ce grand peintre n’intéressait personne. Eh bien, sans hésiter, puisque pas un collectionneur n’enchérissait, Cérès a levé la main, acheté la toile en question, prête à aider ce créateur encore méconnu à s’en sortir. L’émotion que Dominique a ressentie ce jour-là, la fierté d’être la fille de cette femme audacieuse, seule contre tous, lui ont aussi permis d’exister comme elle l’a fait par la suite, et de s’épanouir à son tour dans sa galerie et par l’art.
Dois-je l’avouer, et je ne suis sans doute pas la seule, elle m’intimidait, Cérès. Devant elle, impétueuse, je perdais mes moyens. Sa façon de s’adresser à Patrick, en l’appelant « Guallino », avec son si inimitable accent, mieux que chantant, une merveilleuse admiration dans les yeux, le haussait, tout en haut, dans l’Histoire de l’Art : je savais qu’elle respectait le travail de ses artistes, parce qu’elle avait un œil, puissant, déterminé, une compréhension intime de l’art, et ses encouragements comptaient, son enthousiasme avait valeur d’autorisation, de stimulant, et mieux encore de récompense.
Elle était scrupuleuse, honnête – réglait ses ventes le jour même. Infaillible dans ses jugements, elle complimentait, admonestait, encourageait. Elle jugeait, elle se donnait, pleine et entière, dans son immersion totale dans la création. Toute une vie, dans ce combat !
Pour une exposition en Suisse, à la galerie de Flora Berne Une sardine collée au mur, elle a écrit un texte sur Patrick, reproduit dans la revue Gazogène par Jean-François Maurice : Patrick Guallino dans la ville où l’enfant est un prince. Elle commençait par « Il est un artiste à qui on demande où il va avec son jeu. » Je crois que je pourrais lui retourner cette citation de Montherlant qu’elle avait volontairement transformée, oui : « Il est une galeriste à qui on » pourrait demander « où elle va avec son jeu. »
Ici, à Montolieu, dernier endroit où nous l’avons vue, admirée, si vive, si vivante, au moment de l’inauguration de La Coopérative, j’ai pensé qu’elle était vraiment la galeriste et plus encore LA collectionneuse restée enfant de cette ville à part qu’est l’art. Inutile de lui demander où elle va, où elle allait avec son jeu. À l’essentiel, et cette exposition, cette collection, en témoignent.
Merci à toi, Cérès, ton œil de Bœuf, si merveilleusement rappelé sur l’invitation à cette journée, a toujours été une pupille de qualité, un regard rare, une ouverture capable du plus grand des effets.
Cérès tu es là, aujourd’hui, et tu le seras pour toujours : MERCI.
Anne Poiré Guallino
19 octobre 2022
Voici l'invitation...
Le samedi 22 octobre à 17h
Hommage
« Ce qu’il faut c’est supprimer les mots
et exprimer tout par des images »,
Cérès Franco
Crédit : Patrice Bouvier
Claudie Faucon Méjean,
Présidente du GIP-Musée Cérès Franco
Philippe Hardouin,
Président de l’Association
pour la valorisation de la Collection Cérès Franco,
son gendre
Cecilia Matteucci,
Directrice artistique
de La Coopérative-Musée Cérès Franco
Camilla Rommelaere,
Clémence Hardouin
et Lucie Polad-Hardouin, ses petites-filles
Ont le plaisir de vous inviter
à célébrer la mémoire de Cérès Franco
à l’occasion de la pré-clôture
de l’exposition Féminin Plurielles
et la fermeture au public du musée
pour travaux jusqu’en 2025
Le 22 octobre 2022 de 17h00 à 21h00
À La Coopérative-Musée Cérès Franco,
5 route d'Alzonne, 11170 Montolieu.
Au programme : visite de l’exposition,
projection du film « Cérès » de Clémence Hardouin
suivie d’un concert de musique latino-américaine et d’un vin d’honneur.
Contact : info@museeceresfranco.com
La Coopérative-Musée Cérès Franco
J'évoquais déjà ce lieu majeur,Et voici le texte rédigé par Cérès Franco,sur "Guallino", comme elle l'appelait,offert par elle il y a quelques années désormais :Patrick Guallino
dans la ville
où l’enfant
est un prince.
Il est un artiste à qui on demande
où il va avec son jeu.
Tantôt il est sérieux avec ses
peintures sur toile dans la tradition
expressionniste à la manière de COBRA,
pour aussitôt après nous amener
sur un terrain ludique
où le jeu est celui du magicien.
Il invente alors des tableaux
sur d’épais cartons d’emballage
sur lesquels il crée des images
avec des griffures,
formant un graphisme
qui laisse transparaître
des signes et des figures
savamment déjetées.
Puis il y a ses sculptures
en bois polychrome
- son oeuvre majeure -
réalisées pour notre délectation.
Ce sont des sculptures
qui pourraient figurer
dans un parc idéal,
une sorte de jardin royal
dans la ville où l’enfant
est un prince.
Nous pourrions ainsi voir
notre cher Patrick Guallino,
en artiste comblé,
nous accueillir avec son sourire
qui nous tient charmés.
Cérès Franco
été 2001 - Lagrasse
Cérès Franco - Dominique Polad Hardouin sa fille - Patrick Guallino
Juin 1993 - Anne Poiré, Patrick Guallino
galerie L'œil de bœuf exposition personnelle Patrick Guallino
Patrick Guallino Cérès Franco - inauguration de la Coopérative à Montolieu
Dominique Polad-Hardouin - Patrick Guallino
Dominique Polad-Hardouin - Henri Foch - Anne Poiré Guallino
Inauguration du Musée de Montolieu en 2015
J'évoquais déjà la Collection Cérès Franco,et sa riche histoire, ici, sur ce blog.
Tags : Poiré, Guallino, Montolieu, Cérès Franco, La coopérative, 2022, hommage, peinture, sculpture
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